Gustave Flaubert (1821-1880)
Le langage du corps
Oiseaux est une volière réunissant près de 200 dessins réalisés par Jochen Gerner entre février 2019 et septembre 2020. Chacun de ces oiseaux a été dessiné au feutre à encre de Chine pigmentée sur des cahiers d'écoliers petit format, originaires de Chine et d'Inde, sur lesquels apparaissent des lignes et carreaux de différentes tailles.
Cette série de dessins constitue une expérimentation graphique visant à explorer les potentialités de la trame, la superposition des traits, et l'association d'un nombre réduit de couleurs dans la création des plumages. En mêlant oiseaux rêvés et réels, cet inventaire interroge les liens entre imaginaire et réalité dans notre vie quotidienne, et nous enseigne que le fantastique se niche le plus souvent dans la réalité du quotidien.
Dans le cadre de cette recherche graphique, Jochen Gerner s'est inspiré du travail de certains illustrateurs du XVIIIe siècle comme celui de François-Nicolas Martinet, qui avait pour habitude de représenter les oiseaux de profil, leur afférant ainsi un caractère noble et raide, contrastant avec la force et l'aspect lumineux des couleurs
Capri et Le Mépris de Godard, Monument Valley et les westerns de John Ford, Paris et Le Fabuleux destin d'Amélie Poulain, cet atlas invite à parcourir, continent par continent, les villes les plus emblématiques, mais aussi des terres inattendues.
Pour chaque film, richement illustré de photos et de cartes, les auteurs présentent l'oeuvre, sa place dans l'histoire du cinéma et les décors, qu'ils soient réels ou non, comme la Cité interdite intégralement reconstruite en Espagne pour Les 55 Jours de Pékin.
Dans ce tour du monde, les auteurs montrent les liens que tissent le cinéaste avec les lieux, à l'instar de Woody Allen et New York. Ils rendent également hommage aux monuments incontournables telle la Statue de la Liberté (Ghostbusters 2, X-Men, Le Jour d'après...) ou encore la planète Mars.
Née en novembre 1887 dans le Wisconsin, Georgia O'Keeffe étudie à l'Institut d'art de Chicago et à la Ligue des étudiants en art de New York. Figure incontournable du cercle d'Alfred Stieglitz, éminent photographe et galeriste new-yorkais dont elle sera la muse et la compagne, elle est au centre de l'effervescence de l'art américain au début du XXe siècle.
Tout au long du siècle, elle dessine en pionnière une voie qui lui est propre, entre figuration et abstraction, modernisme et primitivisme, végétal et minéral, nature et architecture. Ses vues urbaines, ses fleurs, ses paysages hypnotiques - rives sylvestres de Lake George, plaines et canyons du Texas, panoramas désertiques du Nouveau-Mexique ...-, ses squelettes et os d'animaux, souvent en gros plan, forment des motifs récurrents qui s'inscrivent dans un courant biomorphique et subjectif en rupture avec l'abstraction géométrique.
À travers cette monographie de référence, Citadelles & Mazenod invite ses lecteurs à célébrer l'originalité et la singularité d'une artiste visionnaire, en présentant un panorama iconographique d'une ampleur sans précédent.
Les grands maîtres de l'estampe ukiyo-e n'étaient plus de ce monde lorsque leurs oeuvres connurent un succès phénoménal en Occident. Aux siècle suivant, les derniers peintres de l'ukiyo-e, concurrencés par la photographie, se tournèrent vers la peinture et l'illustration.
L'éditeur et commerçant Watanabe Shôzaburô qui appréciait plus que tout les estampes décida de leur donner une seconde vie. Il eut l'idée de créer un nouveau style d'estampes à l'aide de jeunes peintres. Ce mouvement porta dès lors le nom de Shin hanga (nouvelles estampes).
Cet ouvrage propose de remonter le temps jusqu'à la création de ces nouvelles estampes dans les années 1910. De nombreux artistes y participèrent. Ce sont les principaux maîtres de ce mouvement qui sont ici présentés à travers leurs oeuvres.
Inspiré du titre d'un poème de l'écrivain finlandais Aaro Hellaakoski, Me Kaksi (qui se traduit par nous deux en français) célèbre la rencontre fortuite, l'étrange proximité, la présence au monde de deux êtres.
Inspiré du titre d'un poème de l'écrivain finlandais Aaro Hellaakoski, Me Kaksi (qui se traduit par nous deux en français) célèbre la rencontre fortuite, l'étrange proximité, la présence au monde de deux êtres. L'oeuvre littéraire d'Hellaakoski exalte l'expérience de la nature, une naturphilosophie inspirée du romantisme allemand qui tente de saisir l'indicible, la fragilité de notre relation au monde. Cette tentative de restituer des instants fugaces se retrouve dans les images de Pentti Sammallahti. L'idée du duo, du couple, de complices en tout genre apparaît de manière récurrente dans l'oeuvre du photographe. Qu'il s'agisse d'amoureux, d'amis, d'enfants, de passants, de voyageurs, de voisins mais aussi d'un homme et son chien, de deux oiseaux... les images de Sammallahti saisissent des moments singuliers, elles racontent l'attachement, la tendresse, le lien affectif. Regard sur plus de quarante ans de pérégrinations, les photographies de cet ouvrage sont autant de petites saynètes : elles matérialisent l'expérience de la dualité. Souvent immergés dans une nature majestueuse, des landes irlandaises ou steppes mongoles, enfants, femmes, hommes et animaux se regardent, s'accompagnent, s'enlacent, marchent côte à côte : l'être au monde devient évidence. Telles un rêve éveillé, ces images offrent une perception aigue du réel. Chez Sammallahti, la nature est vécue comme une expérience esthétique, sa puissance évocatrice confère aux images le sens du merveilleux. Instants éphémères saisis avec poésie, les images de Me Kaksi s'appréhendent comme des haïkus, elles célèbrent l'évanescence des choses, des fragments de rencontres, l'intimité inattendue, fortuite, exceptionnelle mais aussi parfois d'une puissante évidence. Elles racontent aussi l'universalité du lien affectif, l'être-au-monde ensemble.
Initialement paru en 1879, le premier Opus gravé de Max Klinger (1857-1920) illustre l'imaginaire singulier et poétique de l'artiste. Composé de huit eaux fortes réunies sous la forme d'un portfolio, cet ensemble montre toute l'étendue de la virtuosité de l'artiste et la puissance de ses images oscillant en permanence entre rêve et réalité.
Dans la chaleur de l'été 2019, Rosa Maria Unda Souki devrait être plongée dans les préparatifs de son exposition à venir. Recluse au Couvent des Récollets, entre vertiges du doute et farouche détermination, elle tarde à rédiger le texte destiné au catalogue, à penser l'agencement des tableaux - toujours en cours d'acheminement depuis le Brésil.
Dans l'attente, elle retrace ce qui l'a menée là. Comment elle a consacré cinq ans à la figure emblématique de Frida Kahlo en peignant sa célèbre Maison bleue, constituant une oeuvre picturale d'une richesse saisissante. En quête d'elle-même, Rosa Maria renoue avec une Frida intime, comme si les clés pour se retrouver elle-même étaient aussi celles qui permettent de comprendre Frida. Rosa Maria investit les espaces, présents et passés : l'atelier où elle réside à Paris, le lieu de cette exposition en cours, mais aussi la maison de sa propre enfance à Guama, au Venezuela. Elle cherche à rendre l'écho des voix, celle de son père disparu, celle du pays dont elle s'est exilée, celle de Frida.
Dans un dialogue permanent, superbement illustré de dessins au graphite et des tableaux originaux de l'auteure, Ce que Frida m'a donné nous invite à un troublant voyage, à la fois très personnel et universel, au coeur même du processus créatif, de la construction de la mémoire et de la réconciliation avec soi-même.
Cette monographie est éditée par le Fonds Hélène & Edouard Leclerc de Landerneau à l'occasion de la grande exposition qu'il consacre à Françoise Pétrovitch. Véritable ouvrage de référence, le livre, dont chaque chapitre s'ouvre sur la parole de l'artiste, retrace l'ensemble de son parcours de façon chrono-thématique, dévoilant au passage des images des ateliers et des oeuvres jamais montrées ou réalisées pour l'exposition. De nombreux écrits de spécialistes de l'histoire de l'art ou même de la romancière Marie Darieussecq, qui livre pour l'occasion un texte inédit, s'y succèdent. Accompagnés de quelques 200 illustrations ils font Écho À la richesse de l'oeuvre de Françoise Pétrovitch et de ses techniques : peintures, sculptures, dessins, céramiques, estampes et vidéos. A travers les images récurrentes de l'artiste ou « motifs-traits » (mains, yeux fermés, personnages hybrides, fragiles, enfants ou animaux, etc.) c'est un travail sur le regard qui se découvre et nous propose son interprétation du monde.
Une oeuvre d'art actuel incontournable.
Un puzzle de 1000 pièces pour reconstituer un dîner chez les impressionnistes avec Monet, Berthe Morisot, Renoir et Degas, parmi d'autres.
Il est des livres de critique qui sont comme un apport versé aux oeuvres. Le lecteur y devine le parti-pris d'une sensibilité ;
Il comprend que l'auteur y manifeste sa vision singulière et que celle-ci instille dans les tableaux un principe insistant, retient et accentue certaines de leurs tendances, dépose à leur surface le glacis d'un regard. Mais cette vision est si persuasive, elle se glisse si harmonieusement parmi les formes de la peinture, les épouse si bien et les sublime à un tel degré, en un propos qui a pour lui, plus encore que la conformité d'une description, la vérité d'une écriture - on pardonne à l'auteur cette sorte de partialité, et même on lui en est reconnaissant. L'Ingres de Gaëtan Picon est de ces livres-là.
Parue en 1967 chez Skira, cette monographie pro-clame sans ambages le « génie » d'Ingres : génie précoce et immédiat, génie durable, comme soustrait aux atteintes du temps - mais aussi bien, génie faillible, inégal, qui aurait laissé derrière lui, à côté de portraits et de compositions « naturellement » infaillibles, des oeuvres « douteuses », des échecs. Or cette inconstance, nous dit Picon, loin de parler de façon univoque en défaveur de l'oeuvre, nous conduit en son coeur : « Si Ingres est un sujet privilégié, c'est que parler de lui nous imposant à la fois la perspective du constat et celle du jugement, nous sommes ramenés à cette vérité aujourd'hui assez méconnue que la cohérence de l'oeuvre, constatée et décrite comme système et nature, n'est rien d'autre que la réussite aléatoire d'une aventure. »
« Ce qui l'obsède c'est ce qui se produit quand un être humain est vu par un autre être humain qui a l'obsession de représenter ce qu'il voit. » C'est en ces termes que David Sylvester résume l'obsession de Giacometti. Or, à la lecture de cette étude, ou de cette succession d'études écrite et peu à peu augmentée entre les années 1950 et 1990, on en vient à se demander comment nous pourrions résumer la sienne. En termes semblables, peut-être ? Dans sa préface de traducteur datant de la première parution chez André Dimanche Éditeur en 2001, Jean Frémon en a l'intuition : « On pourra y trouver des redites, une manière très particulière de tourner autour de la question, un excès de méticulosité dans l'analyse. En réalité, une méthode qui est exactement celle de Giacometti lui-même, sculptant ou dessinant, constamment taraudé par le sentiment de l'échec et obsédé par la justesse du regard. »
En 1990, cent ans après Edmond de Goncourt, auteur de la première monographie européenne jamais consacrée à un peintre japonais, Kenneth White estimait que « les temps étaient sans doute mûrs pour un essai (genre à la fois informé, pensant, poétique et rapide) sur Hokusaï, qui, tout en puisant dans une masse énorme d'études historiques, socioculturelles et iconographiques, essaie de dégager l'espace propre à Hokusaï et d'ouvrir des perspectives ». C'était nommer à la lettre son ambition et son accomplissement.
Trente ans plus tard, cette coupe transversale dans l'oeuvre de l'artiste continue de fournir une introduction idéale.
Manet ne cria pas, ne voulut pas s'enfler : il chercha dans un véritable marasme : rien ni personne ne pouvait l'aider. Dans cette recherche, seul un tourment impersonnel le guida. Ce tourment n'était pas celui du peintre isolément?: même les rieurs, sans le comprendre, attendaient ces figures qui les révulsaient mais qui plus tard empliraient ce vide qui s'ouvrait en eux. Manet, accoucheur «?impersonnel?» de l'art moderne?? Paru pour la première fois chez Skira en 1955, ce Manet-là - comme l'analyse utilement la préface de Françoise Cachin à la réédition de 1983 - est celui de Georges Bataille - et donc une oeuvre en prise directe sur les débats esthétiques de son temps, dont elle parle aussi le langage. C'est ce qui lui confère sa singularité impérissable, ainsi que sa portée historique. Le Manet de Bataille est presque un personnage. Personnage littéraire d'abord, ami des plus grands poètes et écrivains de son temps, Baudelaire, Zola, Mallarmé, qui tous lui ont écrit ou ont écrit sur lui. C'est à ces sources privilégiées que s'abreuve Bataille pour dépeindre un Manet déjà romanesque, quoique falot?: «?un homme du monde, à vrai dire en marge du monde, en un sens insignifiant?», «?au-dedans, rongé par une fièvre créatrice qui exigeait la poésie, au-dehors railleur et superficiel?», «?un homme entre autres en somme, mais charmant, vulgaire... à peine.?» Manet utilité, donc - mais en même temps nécessité de l'histoire de l'art, «?instrument de hasard d'une sorte de métamorphose?», homme par qui le scandale arrive bien malgré lui, initiateur innocent de la «?destruction du sujet?»?: «?c'est expressément à Manet que nous devons attribuer d'abord la naissance de cette peinture sans autre signification que l'art de peindre qu'est la «peinture moderne»... C'est de Manet que date le refus de «toute valeur étrangère à la peinture».?» C'est alors en continuateur des grandes exégèses de Valéry et surtout de Malraux que Bataille s'exprime. Là où il est tout entier lui-même, et inimitable, c'est dans les intuitions par lesquelles il traverse l'oeuvre du peintre comme la foudre, appuyant sa vision sur une sélection de tableaux qu'il légende avec brio. À supposer que ce Manet ne soit pas le vrai, il n'en possède pas moins sa valeur propre.
« Toute oeuvre de Beuys meurt en chemin, le seul fait de l'emballer, de l'enlever au sol, de figer son ordre établi autrefois perturbe le souvenir, profane la relation. La fugacité, tel est le problème de l'art de Beuys. » Cette observation de Markus Lüpertz énonce le sens et la nécessité de la Déploration de Joseph Beuys qu'Alain Borer signa en ouverture du catalogue de l'exposition posthume organisée au Centre Pompidou en 1994, ainsi que de sa réédition à part, aujourd'hui, à L'Atelier contemporain.
Plus le temps passe, en effet, plus s'éloigne cette oeuvre qui, ayant suscité le commentaire à l'égale des plus grandes du XXe siècle, a par rapport à elles le désavantage mais aussi la force singulière d'avoir été incarnée par son auteur. « OEuvre-vie », dans les termes de Borer, oeuvre faite chair, en actions et en discours, forcément inachevée, interrompue par la mort et appelant par conséquent le thrène, l'hommage, la commémoration, de même qu'elle suscita du vivant de l'artiste la fascination, voire l'idolâtrie.
Dans cette introduction érudite à une oeuvre qui « présentant tous les signes d'une complexité dérangeante, est de celles qui ne peuvent faire l'économie d'une large réflexion théorique », Alain Borer ne ménage pas inutilement le mythe. Relevant chez Beuys des traits sciemment christiques et, dans son parcours, une touche voulue de légende dorée, sa Déploration ne donne pas dans l'hagiographie ; elle nomme sans ergoter l'apparence de « rabâchage », voire de « flou artistique », et l'esprit de sérieux de cette « conférence permanente », contrepied total de l'art pour l'art. Mais l'examen attentif des problèmes soulevés par cet homme-oeuvre permet au tact et au talent de Borer de les surmonter en nommant l'ambition, inclassable à force d'être totalisante, qui lui confère ce qu'il faut bien appeler à plus d'un titre sa grandeur.
Analysant les travaux et les performances dans l'ensemble et dans le détail, explorant la figure de Beuys en cercles concentriques constituant autant d'avatars d'un artiste « pédagogue-berger-thérapeute-évolutionnairerévolutionnaire », l'hommage d'Alain Borer rend justice à celui qui fut l'auteur d'un concept d'art infatigablement élargi à toute la société ; qui vit en chaque homme un artiste attendant pour s'éveiller d'être reconduit aux principes manifestés par la vie et les matériaux naturels ; qui professa très tôt la nécessité de l'assainissement du rapport de l'humanité à son environnement ; et qui, armé d'une inlassable volonté de guérir son pays natal, ouvrit la voie à toute la génération d'artistes allemands de l'après-guerre.
Aimer David, ce titre n'est pas pour Alain Jouffroy l'aveu d'une tocade mais l'énoncé d'un programme. Cet essai paru en 1989, pour les 200 ans de la Révolution et parallèlement à la grande rétrospective consacrée à David au Louvre, s'inscrit dans un plus vaste engagement de l'auteur pour, à l'encontre de la proclamation de la mort du sens sous la «?tyrannie esthético-morale du nihilisme?», renouer le fil d'une «?nouvelle peinture d'histoire?» signifiante dont il voit les continuateurs en certains peintres de la figuration narrative et, en David, le grand initiateur. Il s'agit donc de revenir à ce que fut ce dernier avant de devenir dans notre esprit le peintre des images glacées de nos livres d'histoire?: l'homme d'une révolution politique et esthétique. Cette défense et illustration de David est le fruit d'une subjectivité bien informée qui tour à tour célèbre des aspects méconnus du peintre et affronte sans ciller les reproches historiques qui lui sont adressés, en particulier son engagement passionné aux côtés de Robespierre en tant que député de la Convention et ses concessions à Bonaparte. Chapitre après chapitre, elle se présente sous la forme d'une lutte de points de vue (documents à l'appui en annexes) entre d'une part les adversaires de David, dans les tourments de son temps et par la suite, et d'autre part ses défenseurs?: Baudelaire, Delacroix, Apollinaire pour les plus éminents - ainsi, bien sûr, que Jouffroy lui-même. De tout cela se dégage l'image d'un peintre impulsif et bouillant, «?double?» de Sade, présent à son époque comme peu d'autres, peignant sur le champ de bataille de l'histoire à ses risques et périls, et à mille lieues de l'image courante d'un néo-classicisme froid. Alain Jouffroy admet sans ambages le caractère partisan de son entreprise. Mais ce faisant, il agit justement en puissant révélateur de ce que la réputation du peintre dissimule d'idéologie sous couvert de jugement esthétique, toute lecture de la Révolution française ayant par force des implications politiques, même deux siècles après. «?Aragon, oui?! Char, oui?! Breton, oui?! Claudel, non?!?»?: telle est, à l'extrême, la façon dont l'approche de David et de son temps donne matière à l'auteur pour affirmer une vision autre de notre histoire dans ses aspects politiques et artistiques et, du même coup, le recoupement impératif de ces deux champs.
« Dürer donne rendez-vous en l'an 2000. À présent que nous sommes à l'échéance annoncée, que reste-t-il à écrire de Dürer ? » Question bien légitime que celle qui inaugure Le Burin du graveur, publié pour la première fois il y a quarante ans en introduction d'une édition de L'OEuvre gravé complet (Hubschmidt & Bouret, 1980). Citant pour points de départ les études de Pierre du Colombier, Paul Vaisse ou encore Erwin Panofksy, qu'il nomme ses « matériaux », Alain Borer s'engage ouvertement dans un tour d'horizon ; et c'est armé d'une érudition considérable et d'un fécond esprit de synthèse qu'il réarpente, réagence et révèle les grandes lignes de la constellation Dürer.
Difficile par conséquent de résumer cette étude qui pourrait bien être à l'image du peintre luimême : monographique, certes, de même que se veut unique et inimitable l'auteur d'autoportraits marquant au sortir du Moyen-Âge la « prise de conscience de l'individu », l'« exaltation de la personnalité » et le « stade du miroir de la peinture » ;
Mais surtout profuse, effervescente, comme le sont les intérêts et les facettes de l'homme de la Renaissance.
On découvrira ou redécouvrira ainsi Dürer en voyageur, observateur et chroniqueur dans ses écrits et ses dessins ; collectionneur à la « curiosité tous azimuts » ; découvreur avide mais point avare de ses découvertes ; féru d'astrologie et de caractérologie ; théoricien pionnier ; mais aussi innovateur dans son métier, peintre maniaque, obsédé par « la perfection technique et l'idée même de beauté » ; orfèvre ; à la fois « humaniste, pieux et luthérien, bon époux et bon citoyen, sage comme une image » et auteur de lettres débordantes de gaudriole et de paillardise...
Ouvrage, en somme, qui loin de réduire Dürer au mince tracé d'une ligne claire, s'étoffe pour rendre compte de sa grandeur.
Avec Magritte ne pourrait mieux porter son titre.
Réunissant en 1977, dix ans après la mort du peintre, les écrits qu'il lui avait consacrés entre les années 1940 et 1960, Louis Scutenaire immortalisait là une complicité de quarante ans, entre compagnonnage et « copinage ».
On connaît Géricault pour ses peintures de chevaux transis par la foudre, pour ses portraits d'enfants les plus troublants de l'art français, pour ses têtes de fous qui n'ont aucun équivalent dans l'histoire de la peinture, et pour son immense tableau révolutionnaire et moderne, Le Radeau de la Méduse, chef-d'oeuvre du Romantisme et protestation de la vie jusque dans la mort. On sait aussi que sa vie fut brève et fulgurante, son oeuvre inachevée mais géniale, et que sa mémoire fut révérée par tous les artistes du XIXe siècle.