Gustave Flaubert (1821-1880)
Le langage du corps
Une sélection d'ouvrages comme hommage
Comment combler le fossé apparemment infranchissable séparant les sciences (chargées de comprendre la nature) et la politique (chargée de régler la vie sociale), séparation dont les conséquences deviennent de plus en plus catastrophiques ?
La nature a toujours constitué l'une des deux moitiés de la vie publique - celle qui nous unit -, l'autre moitié formant ce qu'on appelle la politique, c'est-à-dire le jeu des intérêts et des passions - qui nous divise. L'écologie politique a prétendu apporter une réponse mais, à cause des controverses scientifiques qu'elle suscite, à cause de l'incertitude sur les valeurs qu'elle provoque, elle oblige à abandonner la nature comme mode d'organisation publique.
Selon Bruno Latour, la solution repose sur une profonde redéfinition à la fois de l'activité scientifique (à réintégrer dans le jeu normal de la société) et de l'activité politique (comprise comme l'élaboration progressive d'un monde commun). Ce sont les conditions et les contraintes de telles redéfinitions qu'il explore ici.
le recours aux liens juridiques prend chaque jour dans nos sociétés une importance grandissante.
il existe pourtant peu d'études empiriques sur la fabrique quotidienne du droit. alors que la très grande technicité de la matière juridique réserve le droit aux juristes de profession, la sociologie croit souvent pouvoir s'en
débarrasser en l'expliquant par les rapports de forces qu'il ne ferait que dissimuler. la méthode ethnographique se trouve donc particulièrement bien ajustée à l'analyse du droit au quotidien.
c'est toute l'originalité de cette étude ethnographique du conseil
d'état que propose ici bruno latour. il y porte une grande attention aux actes d'écriture, à la fabrication et à la manipulation des dossiers, aux interactions entre les membres, aux particularités du corps des conseillers d'état, mais surtout à la diversité des ressorts qui permettent de bien juger. l'aridité même du droit
administratif français aurait de quoi effaroucher le plus courageux des lecteurs : heureusement, par une grande qualité de style, l'auteur a su à la fois rendre compte de la technicité des jugements et renouer les nombreux liens entre le droit et cette société qui le nourrit et à laquelle il sert, en même temps, de garant.
après une série d'études sur les laboratoires scientifiques, les innovations techniques, le discours religieux, la parole politique,
bruno latour continue ici, avec le droit, son programme d'anthropologie systématique des formes contemporaines de véridiction.
Cet essai voudrait relier trois phénomènes que les commentateurs ont déjà repérés mais dont ils ne voient pas toujours le lien - et par conséquent dont ils ne voient pas l'immense énergie politique qu'on pourrait tirer de leur rapprochement.
D'abord la « dérégulation » qui va donner au mot de « globalisation » un sens de plus en plus péjoratif ; ensuite, l'explosion de plus en plus vertigineuse des inégalités ; enfin, l'entreprise systématique pour nier l'existence de la mutation climatique.
L'hypothèse est qu'on ne comprend rien aux positions politiques depuis cinquante ans, si l'on ne donne pas une place centrale à la question du climat et à sa dénégation. Tout se passe en effet comme si une partie importante des classes dirigeantes était arrivée à la conclusion qu'il n'y aurait plus assez de place sur terre pour elles et pour le reste de ses habitants. C'est ce qui expliquerait l'explosion des inégalités, l'étendue des dérégulations, la critique de la mondialisation, et, surtout, le désir panique de revenir aux anciennes protections de l'État national.
Pour contrer une telle politique, il va falloir atterrir quelque part. D'où l'importance de savoir comment s'orienter. Et donc dessiner quelque chose comme une carte des positions imposées par ce nouveau paysage au sein duquel se redéfinissent non seulement les affects de la vie publique mais aussi ses enjeux.
À l'automne 2009, une étudiante allemande fait part à Bruno Latour de son désarroi devant les disputes qui font rage avant le sommet de Copenhague sur le climat. Il lui signale l'existence d'un enseignement qui porte sur les liens multiformes entre les sciences, la politique et la nature. Pour diverses raisons, l'étudiante ne peut pas suivre le cours, que le professeur lui résume en six lettres. Au ?l de l'actualité que l'étudiante suit de son côté en tenant son « journal de bord », elle découvre peu à peu comment se repérer dans ces imbroglios créés par le développement même des sciences et des techniques.
D'Archimède àAvatar, c'est l'occasion pour le lecteur d'un époustou?ant galop dans le domaine des « humanités scienti?ques » : si la nature est entrée en politique, il faut bien que les sciences et les techniques fassent partie de ce qu'on appelait autrefois les « humanités ». Bruno Latour, dans ce véritable plaidoyer pour la « culture scienti?que », montre qu'il est impossible d'aborder les crises écologiques sans comprendre le caractère collectif et concret de l'acte de penser et de prouver. D'où le passage du cogito, cher à Descartes, à ce cogitamus, parce que « c'est grâce au fait que nous sommes nombreux, soutenus, institués, instrumentés que nous accédons au vrai ».
Pollution des rivières, virus du sida, trou d'ozone, robots à capteurs... Comment comprendre ces « objets » étranges qui envahissent notre monde ? Relèvent-ils de la nature ou de la culture ? Jusqu'ici, les choses étaient simples : aux scientifiques la gestion de la nature, aux politiques celle de la société. Mais ce traditionnel partage des tâches est impuissant à rendre compte de la prolifération des « hybrides ». D'où le sentiment d'effroi qu'ils procurent.
Et si nous avions fait fausse route ? En fait, notre société « moderne » n'a jamais fonctionné conformément au grand partage qui fonde son système de représentation du monde, opposant radicalement la nature d'un côté, la culture de l'autre. Dans la pratique, les modernes n'ont cessé de créer des objets hybrides qu'ils se refusent à penser. Nous n'avons donc jamais été vraiment modernes, et c'est ce paradigme fondateur qu'il nous faut remettre en cause.
Traduit dans plus de vingt langues, cet ouvrage, en modifiant la répartition traditionnelle entre la nature au singulier et les cultures au pluriel, a profondément renouvelé les débats en anthropologie. En offrant une alternative au postmodernisme, il a ouvert de nouveaux champs d'investigation et offert à l'écologie de nouvelles possibilités politiques.
Le spectre de la modernisation hante la planète. On compare les sociétés en fonction de leur plus ou moins grand degré de modernisation ; on s'interroge sur ses vertus, ses dangers, son degré d'universalité ou son obsolescence. Or, chose étrange, on manque d'une description anthropologique de ceux qui se désignent comme étant à l'origine de ce mouvement. Que nous est-il donc arrivé ? De quoi pouvons-nous hériter ? Comment bien nous présenter face aux autres cultures ?
L'auteur a mis au point un dispositif d'enquête pour repérer les valeurs multiples et contradictoires auxquelles tiennent ceux qui se disent modernes. Pour suivre le fil de l'expérience, il faut accepter qu'il y ait plusieurs régimes de vérité, plusieurs modes d'existence, plusieurs types de raison dont l'enquêteur dressera avec soin les conditions de félicité et d'infélicité. En procédant ainsi, on revisite tous les domaines dont l'ensemble forme le coeur de notre vie collective : les sciences, les techniques, mais aussi le droit, la religion, la politique et, bien sûr, l'économie, la plus étrange et la plus ethnocentrique des productions.
Ce livre est un premier « rapport d'enquête ». L'anthropologie philosophique qu'il esquisse donne à la comparaison des cultures une autre base que celle d'un front universel de modernisation. Il complique l'image que les Modernes ont d'eux-mêmes, mais aussi celle que les autres peuvent avoir sur eux. L'enjeu n'est pas mince au moment où les crises écologiques obligent les sociétés à repenser ce qu'elles ont en commun.
Les lecteurs pourront participer à l'enquête grâce à un site Internet. Ils y trouveront l'apparat critique qui complète le livre, mais aussi l'occasion de comprendre autrement les arguments ou même de participer à leur transformation. Les lecteurs deviendront co-producteurs de la version finale de l'ouvrage.
À quelles conditions l'écologie, au lieu d'être un ensemble de mouvements parmi d'autres, pourrait-elle organiser la politique autour d'elle ? Peut-elle aspirer à définir l'horizon politique comme l'ont fait, à d'autres périodes, le libéralisme, puis les socialismes, le néolibéralisme et enfin, plus récemment, les partis illibéraux ou néofascistes dont l'ascendant ne cesse de croître ? Peut-elle apprendre de l'histoire sociale comment émergent les nouveaux mouvements politiques et comment ils gagnent la lutte pour les idées, bien avant de pouvoir traduire leurs avancées dans des partis et des élections ?
Jusque-là, on pouvait invoquer la Nature (et la Science) : elle était l'arbitre ultime de nos querelles humaines. La Nature constituait l'arrière-plan de nos actions. Elle obéissait à des lois, mais ne se mêlait pas de nos histoires.
Or, à cause des effets imprévus de l'histoire humaine, ce que nous regroupions sous le nom de Nature quitte l'arrière-plan et monte sur scène. L'air, les océans, les glaciers, le climat, les sols, tout ce que nous avons rendu instable, interagit avec nous. Nous sommes entrés dans la géohistoire. C'est l'époque de l'Anthropocène. Avec le risque d'une guerre de tous contre tous.
L'ancienne Nature disparaît et laisse place à un être dont il est difficile de prévoir les manifestations. Cet être, loin d'être stable et rassurant, semble constitué d'un ensemble de boucles de rétroactions en perpétuel bouleversement. Gaïa est le nom qui lui convient le mieux.
En explorant les mille figures de Gaïa, on peut déplier rétrospectivement tout ce que la notion de Nature avait confondu : une éthique, une politique, une étrange conception des sciences et, surtout, une économie - et même une théologie. Finalement, la Nature était très peu terrestre. Gaïa, c'est le nom du retour sur Terre de tout ce que nous avions un peu rapidement envoyé off shore.
Alors que les Modernes regardaient en l'air, les Terriens regardent en bas. Les Modernes formaient un peuple sans territoire, les Terriens recherchent sur quel sol poser leurs pieds. Ils reviennent sur une Terre dont ils acceptent, enfin, d'explorer les limites ; ils se définissent politiquement comme ceux qui se préparent à regarder Gaïa de face.
Bruno Latour est un des philosophes contemporains les plus influents. Ses études ethnographiques ont révolutionné notre compréhension des sciences, du droit, de la politique et de la religion. Il nous propose une philosophie et une approche des sciences sociales radicalement nouvelles, fondées sur un point de vue réaliste, matérialiste sur le monde.
Dans ses livres fondateurs, il proposait de renoncer aux vieilles distinctions propres à la pensée « moderne » occidentale - en particulier entre nature et société - au profit d'une nouvelle description du monde dans lequel nous vivons. Elle l'a conduit à accorder une importance considérable à la crise écologique et au rôle des sciences en démocratie.
La « philosophie empirique » de Latour a évolué au fil du temps. Gerard de Vries expose avec clarté le cheminement et la logique de tous les travaux et enquêtes qu'il a menés au cours des quarante dernières années. Il nous guide à travers ses principaux livres depuis ses premiers travaux sur les sciences et les techniques jusqu'à son anthropologie des Modernes (de Pasteur à Gaïa), montrant la façon dont ses idées se sont développées et les controverses qu'elles ont provoquées.
Porte-clefs, ralentisseurs, ceintures de sécurité, chatières, grooms de porte, nous entrons tous les jours en relation avec des dispositifs que l'on ne peut sans dommage réduire réduire à leur simple fonction d'objets techniques. Molécules, formules chimiques, cartes, diagrammes, microbes et galaxies, nous nous trouvons quotidiennement confrontés à des ensembles que l'on ne peut réduire sans risque à de simples faits scientifiques. Décidément, la connaissance est une affaire trop sérieuse pour être laissée aux seuls savants.
Amateur de science (comme on dit « amateur d'art »), Bruno Latour nous invite à « goûter » avec lui les techniques et les sciences, à en apprécier les forces et les faiblesses, à en critiquer la forme et le facture. Dans ce recueil de chroniques, il nous promène du bureau de Gaston Lagaffe, nouvel Archimède, aux anges du paradis, an passant par Berlin, les sols d'Amazonie, le fonctionnement du rein, et les cornéliens dilemmes d'une ceinture de sécurité... Dans un style allègre, il nous fait partager sa jubilation devant des objets et des faits qui mêlent toujours plus intimement les choses et les gens.
Conçues pour un large public, ces leçons s'adressent à tous ceux qui ne peuvent se résigner à réserver le nom de culture aux seules oeuvres d'art, et qui cherchent à se former le goût pour les faits avérés comme pour les techniques efficaces.
Ce livre marque une étape clef dans le projet de Bruno Latour : faire l'anthropologie des modernes. Il est composé de deux textes dont l'objectif est de remettre en cause des notions qui nous tiennent habituellement à coeur : celle de « croyance » et celle de « critique ». Avec humour, Bruno Latour bricole deux notions : celle de faitiche et celle d'iconoclash. Elles lui permettent d'abolir la distance que nous avions crue solidement établie entre nous (les modernes) et les autres. La notion de faitiche permet de douter de la croyance en la croyance, celle d'iconoclash permet de suspendre le geste iconoclaste pour en interroger l'histoire. Il remet ainsi en cause toute une partie de l'édifice sur lequel sont construites les science humaines. Mais, chemin faisant, il crée les outils pour nous aider à nous comprendre nous-mêmes, à faire notre propre anthropologie.
Nous vivons entourés des produits de la technique, nos têtes sont pleines des résultats de la science. Pourtant, nous savons fort peu de choses sur la production des machines et sur la construction des découvertes. D'où viennent-elles ? Mystère... Il y a bien, pour nous l'expliquer, des scientifiques et des épistémologues, mais nous aimerions aller voir par nous-mêmes dans la littérature, dans les laboratoires, dans les bureaux d'études, dans les salles de conseils d'administration, chez les hommes politiques, comment se prépare ce monde dans lequel nous allons vivre.
Impossible d'y pénétrer ? Pas si sûr. Car si la science faite est rébarbative et fermée, la science en action est ouverte et accessible. Depuis les années 1970, un immense domaine d'étude s'est ouvert qui a profondément renouvelé notre vision de l'activité scientifique. À partir d'anecdotes et d'exemples, ce livre dégage les règles de méthodes qui permettront à ceux qui le souhaitent de continuer à suivre le travail des scientifiques et des ingénieurs. Car la science est devenue un vaste chantier où se forgent à la fois la nature et la société : comprendre une société, c'est dorénavant comprendre ses sciences et ses techniques en action, et ce livre, devenu un classique, sera, dans cette quête de connaissance, le plus précieux des viatiques.
Les conceptions que les chercheurs, les journalistes, les décideurs et le grand public se font des sciences datent au mieux d'une cinquantaine d'années, au pire de deux siècles. Alors que les crises écologiques ont mis les activités scientifiques et les innovations techniques au coeur des débats contemporains, nous continuons à les penser comme on le faisait au temps de la lutte contre l'obscurantisme ou de la modernisation triomphante. Ce décalage empêche de réagir devant les imbroglios de politiques, de droit, de science et de technique dans lesquels nous nous trouvons chaque jour plus profondément emmêlés. On accuse souvent la nouvelle anthropologie des sciences et des techniques d'être « relativiste » et de mettre en péril avec l'objectivité, aussi bien la paix civile que la morale. En menant le lecteur de la forêt amazonienne à l'histoire des techniques en passant par les laboratoires de Pasteur et de Joliot, sans oublier l'agora de Socrate, Bruno Latour montre pourquoi il est devenu indispensable d'offrir enfin une vision réaliste des sciences. En fin de compte, c'est toute la Constitution moderne qu'il faut peu à peu refaire. Ce livre est le compagnon de Politiques de la nature qui en prolonge l'entreprise du côté de la philosophie politique. La science est une chose trop importante pour être laissée aux seuls savants.
Bruno Latour, philosophe et sociologue des sciences, est professeur à Sciences-Po Paris. Il a écrit de nombreux ouvrages et articles sur l'anthropologie du monde moderne. La plupart de ses ouvrages en français ont été publiés à La Découverte, dont Changer de société. Refaire de la sociologie (2006) et Petites Leçons de sociologie des sciences (2007).
Depuis la terrible expérience du confinement, les États comme les individus cherchent tous comment se déconfiner, en espérant revenir aussi vite que possible au « monde d'avant » grâce à une « reprise » aussi rapide que possible. Mais il y a une autre façon de tirer les leçons de cette épreuve, en tout cas pour le bénéfice de ceux que l'on pourrait appeler les terrestres. Ceux-là se doutent qu'ils ne se déconfineront pas, d'autant que la crise sanitaire s'encastre dans une autre crise bien plus grave, celle imposée par le Nouveau Régime Climatique. Si nous en étions capables, l'apprentissage du confinement serait une chance à saisir : celle de comprendre enfin où nous habitons, dans quelle terre nous allons pouvoir enfin nous envelopper - à défaut de nous développer à l'ancienne ! Où suis-je ? fait assez logiquement suite au livre précédent, Où atterrir ?Comment s'orienter en politique. Après avoir atterri, parfois violemment, il faut bien que les terrestres explorent le sol où ils vont désormais habiter et retrouvent le goût de la liberté et de l'émancipation mais autrement situées. Tel est l'objet de cet essai sous forme de courts chapitres dont chacun explore une figure possible de cette métaphysique du déconfinement à laquelle nous oblige l'étrange époque où nous vivons.
" Il faut changer de société ", dit-on souvent et on a bien raison, car celle où nous vivons est souvent irrespirable. Mais, pour y parvenir, il faut peut-être d'abord s'efforcer de changer la notion même de société. Et d'abord distinguer deux définitions du social. La première, devenue dominante dans la sociologie, présente le social comme l'ombre projetée par la société sur d'autres activités, par exemple l'économie, le droit, la science, etc. La seconde préfère considérer le social comme l'association nouvelle entre des êtres surprenants qui viennent briser la certitude confortable d'appartenir au même monde commun. Dans ce deuxième sens, le social se modifie constamment. Pour le suivre, il faut d'autres méthodes d'enquête, d'autres exigences, d'autres terrains.
C'est à retracer le social comme association que s'attache depuis trente ans ce qu'on a appelé la sociologie de " l'acteur-réseau " et que Bruno Latour présente dans ce livre. Sa proposition est simple : entre la société et la sociologie, il faut choisir. De la même manière que la notion de " nature " rend la politique impossible, il faut maintenant se faire à l'idée que la notion de société, à son tour, est devenue l'ennemie de toute pensée du politique. Ce n'est pas une raison pour se décourager mais l'occasion de refaire de la sociologie.
Comment travaillent les scientifiques ? Comment parviennent-ils à produire des découvertes ? Pour répondre à ces questions, le sociologue Bruno Latour a partagé durant deux ans le quotidien des chercheurs du laboratoire de neuroendocrinologie du professeur Roger Guillemin, à l'Institut Salk de San Diego (Californie). Avec la méticulosité et la patience de l'anthropologue, il a suivi les tâtonnements de cette équipe dans une recherche dont le résultat vaudra le prix Nobel de médecine à Guillemin, en 1978.
Cette enquête exceptionnelle, publiée pour la première fois en 1979 et désormais classique, a véritablement lancé le domaine des nouvelles études sur la science, et profondément renouvelé la philosophie des faits scientifiques. Soucieux de rompre avec les « visions exotiques », voire magiques, de la science et de ses méthodes, Bruno Latour et son coauteur Steve Woolgar ont choisi la voie rigoureuse d'une analyse enfin réaliste de sa production : elle les conduit à rendre compte des actions et des hésitations des chercheurs, dans un ouvrage qui se lit comme une enquête policière.