Gustav Caroll pourrait, à vue de myope, être considéré comme le H. P. Lovecraft de la littérature urbaine. Ses visions, toutes issues d'un Paris quadrillé et parfois labyrinthique, paraissent extravagantes, comme infusées de magie noire et de rêves troubles. Or, tout ce qui est extrait de ce Paris gargouillant d'animaux et de végétaux, est rigoureusement vrai : du concert assourdissant d'aboiements de chiens recevant la bénédiction dans une église à l'inquiétant manoir aux cent cinquante chats fantomatiques.
Au sein de ce « Paradis perdu », ou « Enfer retrouvé » (question de tendresse envers les rats, les fourmis ou les renards), tout est étrange car tout est normal, c'est-à-dire quantifiable, visible, scientifiquement correct. L'image de la jungle urbaine, au sens propre et au sens actuel : rien ne dépasse, les souterrains n'existent pas, l'hygiène règle tous les problèmes. Non, Gustav Caroll a raison, c'est bien le paradis, et l'on peut affirmer candidement en refermant ces chroniques, que « tout est au mieux dans le meilleur des mondes possibles ».
L'enjeu est simple mais grave : il s'agit de reprendre possession de son corps, de le sauver de l'embrigadement sportif. Embrigadement d'abord favorisé et de plus en plus organisé par les multinationales et les gouvernements qui voient là un dérivatif parfait à la violence qu'ils pensent être le vice du peuple. Sur les décombres du théâtre populaire, des bibliothèques brûlées et de la télévision de service public pousse le chiendent des pelouses synthétiques. Or le sport si vanté par les experts de la Santé publique est justement devenu un fléau qui brise les corps, des champions comme des amateurs, pour ensuite corrompre et bêtifier le reste. Sous la double menace de l'Euro 2008 et des Jeux de Pékin qui semblent vouloir obscurcir la belle saison qui vient, voici le livre-remède.
À l'heure où pronostics, algorithmes et sondages ne parviennent plus à prévenir ici un Brexit, là un Trump ou un Fillon, Gustav Caroll, écrivain et scénariste converti en intraitable futurologue, nous fait découvrir une France de tous les possibles avec ses 30 présidents auxquels vous avez échappé (sauf un).
En se projetant un an après leur hypothétique élection, l'auteur dresse un paysage politique, social et économique nourri de détails aussi réels que délirants, dans un style qui n'a rien à envier à celui des meilleurs commentateurs politiques. Erwann Terrier, acerbe auteur des couvertures de l'excellente revue Schnock, est ici propulsé portraitiste officiel de la République.
Chiffres, tendances, dates-clés, résultats électoraux, phrases de campagne, chiens-mascottes, sorties de route, rien ne manque pour décrypter l'état de la France si d'aventure Igor Bogdanov, Alain Juppé, Mylène Farmer, Emmanuel Macron, Patrick Sébastien, Manuel Valls ou encore Gérard Depardieu venaient à en prendre le contrôle. Frémissez braves gens, l'avenir n'a pas fini de vous surprendre.