vladimir nabokov
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«Lolita, lumière de ma vie, feu de mes reins. Mon péché, mon âme. Lo-lii-ta : le bout de la langue fait trois petits pas le long du palais pour taper, à trois, contre les dents. Lo. Lii. Ta. Le matin, elle était Lo, simplement Lo, avec son mètre quarante-six et son unique chaussette. Elle était Lola en pantalon. Elle était Dolly à l'école. Elle était Dolores sur les pointillés. Mais dans mes bras, elle était toujours Lolita.»
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Vertige du premier émoi amoureux, fin de la liaison d'un adolescent avec une femme mariée, amour terrorisé d'une femme pour son terrible mari... Perceptions, angoisses, sensations... Exhumées des archives Nabokov et publiées à partir des années 1990 dans The New Yorker, de magnifiques nouvelles à la langue envoûtante et aux sonorités lumineuses.
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Dans les montagnes enneigées de la Suisse, Kern, un étudiant hanté par la mort, éprouve une passion impossible pour l'insaisissable Isabelle. Lorsque Simpson voit le portrait de la Vénitienne peint par Sebastiano del Piombo, il est fasciné et en tombe éperdument amoureux. Le tableau exerce sur lui une telle attirance qu'il ne peut s'empêcher de revenir le contempler jour après jour, jusqu'à ce qu'il pénètre dans la toile... Deux nouvelles au charme subtil et envoûtant par l'auteur controversé de Lolita.
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Le château d'Ardis - les Ardeurs et les Arbres d'Ardis - voilà le leitmotiv qui revient en vagues perlées dans Ada, vaste et délicieuse chronique, dont la plus grande partie a pour décor une Amérique à la clarté de rêve - car nos souvenirs d'enfance ne sont-ils pas comparables aux caravelles voguant vers la Vinelande, qu'encerclent indolemment les blancs oiseaux des rêves ? Le protagoniste, héritier de l'une de nos plus illustres et plus opulentes familles, est le Dr Van Veen, fils du baron «Démon» Veen, mémorable personnalité de Reno et de Manhattan. La fin d'une époque extraordinaire coïncide avec la non moins extraordinaire enfance de Van. Il n'est rien dans la littérature mondiale, sauf peut-être les réminiscences du comte Tolstoï, qui puisse le disputer en allégresse pure, innocence arcadienne, avec les chapitres de ce livre qui traitent d'«Ardis».
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Dans un pays imaginaire, un roi prend le pouvoir après une guerre civile et oeuvre à l'épanouissement de la culture, des sciences et des arts. Personne ne connaît son nom ni son visage. Son rival, guide intellectuel des radicaux, rêve d'une revanche. Pendant ce temps se joue un drame domestique : un ancien rebelle revenu d'exil découvre que sa femme est amoureuse d'un certain Monsieur Morn...
En dépit de sa tonalité parodique, signature bien connue de Nabokov, cette pièce aux accents shakespeariens est une tragédie à part entière, écho poignant d'un drame personnel (le père de Nabokov fut assassiné en 1922), dans le sillage de la révolution russe et de la guerre civile.
Inédite en français, La Tragédie de Monsieur Morn a été écrite durant l'hiver 1923-1924. Elle n'a été ni jouée ni publiée du vivant de l'auteur. -
Oeuvres romanesques complètes Tome 3
Vladimir Nabokov
- Gallimard
- Bibliotheque De La Pleiade
- 4 Février 2021
- 9782070113026
Textes traduits de l'anglais, présentés et annotés par René Alladaye, Jean-Bernard Blandenier, Marie Bouchet, Brian Boyd, Gilles Chahine, Yannicke Chupin, Maurice-Edgar Coindreau, Maurice Couturier, Lara Delage-Toriel, Agnès Edel-Roy, Raymond Girard, Donald Harper et Monica ManolescuAprès le succès planétaire de Lolita, Nabokov jouit d'une grande liberté créatrice. La suite de son oeuvre lance au lecteur, à son intelligence, à son imaginaire, un défi permanent. Le héros de Pnine (roman de 1957 ici proposé dans une nouvelle traduction), professeur d'origine russe enseignant dans une université américaine, c'est-à-dire doté d'une biographie proche de celle de son créateur, sera évincé de son poste par le narrateur du récit, qui se révèle être... Nabokov lui-même. Feu pâle (1962) met en compétition deux types de textes, un poème et son commentaire, deux narrateurs, qui sont l'image inversée l'un de l'autre, et deux univers antagonistes. Puis vient Ada ou l'Ardeur (1969), le chef-d'oeuvre de la période, et peut-être le chef-d'oeuvre de Nabokov. Livre ambitieux, maîtrisé - deux univers, deux narrateurs, de nombreux emboîtements narratifs et un brouillage constant des repères temporels - , c'est aussi, un an après Belle du Seigneur, un grand roman d'amour. Trois ans plus tard, dans La Transparence des choses - «une simple enquête au-delà des cyprès sur l'entrelacs des destinées prises au hasard», disait l'auteur, non sans mystère -, le narrateur, un certain Mr. R., romancier de son état, agit depuis le royaume des ombres... Enfin, Vadim Vadimovitch, narrateur de Regarde, regarde les Arlequins! (1974), le dernier roman publié par Nabokov (car L'Original de Laura restera inachevé et paraîtra après sa mort), ressemble à s'y méprendre à Vladimir Vladimirovitch Nabokov. Autobiographie fictive, variation sur le thème de l'identité, du double, de la copie et de l'original, ultime regard, teinté d'humour et d'ironie, d'un homme sur la trajectoire de sa vie et sur son oeuvre, c'est aussi l'occasion d'une confrontation finale avec un lecteur que Nabokov n'aura eu de cesse de provoquer, défier et enchanter.
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Nouvelle édition augmentée d'une préface de l'auteur traduite de l'anglais par Christine Bouvart en 1991
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Oeuvres romanesques complètes Tome 2
Vladimir Nabokov
- Gallimard
- Bibliotheque De La Pleiade
- 23 Septembre 2010
- 9782070113019
Ce volume marque un tournant. Il contient, d'une part, deux romans écrits en russe à la fin des années 1930:Le Don, le plus magistral des livres russes de Nabokov, et L'Enchanteur, où apparaît la première «nymphette» nabokovienne et qui ne fut publié qu'en 1986, dans la traduction anglaise due au fils de l'écrivain. Il réunit, d'autre part, les trois premiers romans que Nabokov composa en anglais et un livre qui, pour n'être pas le plus connu de son auteur, n'en est pas moins un chef-d'oeuvre:l'autobiographie Autres rivages, dont le point de départ date des années 1930; il s'agissait alors d'un texte en français sur la gouvernante du petit Vladimir, mais il fut entièrement recomposé en anglais avant de paraître en 1951. Période charnière, donc, qui voit la naissance et, avec Lolita, la consécration d'un écrivain de langue anglaise. L'accouchement, qui est aussi un arrachement, ne se fit pas sans douleur. Le changement de terre, le changement de langue, l'ombre menaçante des totalitarismes confèrent aux livres de cette période une particulière intensité tragique. Plusieurs textes évoquent la perte (notamment La Vraie Vie de Sebastian Knight, dont le héros est un écrivain) et ce que le latin nomme desiderium:désir, besoin, regret. Il faut renoncer à l'enfance, aux amours anciennes, à la littérature russe (véritable héroïne du Don), à toutes «ces choses que le destin empaqueta un jour, pêle-mêle, et jeta à la mer». Mais Nabokov, à vrai dire, n'y renonce pas. Il les métamorphose et les rend inoubliables.
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Personne n'aime comme nous
Vladimir Nabokov
- Mille Et Une Nuits
- La Petite Collection
- 26 Janvier 2022
- 9782755508253
« Mon amour pourrait emplir dix siècles de feu, de chants et d'exploits - dix siècles entiers, immenses et aériens, pleins de chevaliers gravissant des montagnes ardentes, de géants légendaires, de Troie en fureur, de voiles orange, de pirates et de poètes. ».
Dans les plus belles lettres à sa femme Véra, Vladimir Nabokov se révèle en amoureux adorateur et indéfectible, inventeur de génie des mots doux les plus fous, en filigrane de sa trajectoire d'écrivain.
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Voici l'autobiographie de Vladimir Nabokov, dans l'édition révisée et augmentée parue aux États-Unis sous le titre Speak, Memory, an Autobiography revisited et comprenant la préface inédite de sa traduction russe. De toutes ses oeuvres écrites en anglais, l'auteur n'a choisi de retraduire lui-même en russe que celles qui lui tenaient particulièrement à coeur : Lolita et Autres rivages. Livre nostalgique sur une Russie disparue, Autres rivages restitue avec une magie éblouissante l'enfance de l'auteur et son exil européen : «Comme le cosmos est petit (une poche de kangourou le contiendrait), comme il est dérisoire et piteux comparé à la conscience humaine, à un seul souvenir d'un individu et à son expression par des mots ! Peut-être suis-je attaché à l'excès à mes toutes premières impressions, mais après tout je leur dois de la reconnaissance. Elles m'ont montré le chemin d'un véritable Eden de sensations visuelles et tactiles.»
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«Cette oeuvre - faut-il dire centaure ou sirène -, oeuvre mi-prose, mi-poème, est une création d'une beauté, d'une originalité parfaites : offrant tout à la fois la symétrie, la singularité et la vérité morale. On y peut voir un objet de curiosité. Ce n'en est pas moins une des plus grandes oeuvres d'art de ce temps : le roman moderne que nous croyions mort et qui n'était qu'endormi.» Mary McCarthy.
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Oeuvres romanesques complètes Tome 1
Vladimir Nabokov
- Gallimard
- Bibliotheque De La Pleiade
- 17 Décembre 1999
- 9782070113002
Chassé de Russie par la révolution d'Octobre, chassé d'Allemagne puis de France par le nazisme, Vladimir Nabokov, écrivain libre, rêvait ses histoires dans une langue et les écrivait dans une autre. Ce premier volume d'une édition qui en comprendra trois est capital à cet égard. De Machenka à l'Invitation au supplice, c'est-à-dire de 1928 à 1938 (si l'on ne prend en compte que les dates de première édition), s'opère en huit romans une «transmigration verbale». D'abord écrites en russe, puis traduites en français ou en anglais, ces oeuvres furent ultérieurement récupérées par Nabokov, qui s'attacha généralement à en donner une nouvelle version, en langue anglaise. Opération essentielle : il ne s'agit pas, pour l'auteur de se traduire, mais de s'approprier une nouvelle langue de création, qui, bientôt, fera de lui l'un des tout premiers écrivains américains. Quant aux thèmes de ces romans, ce sont déjà ceux qui structureront l'ensemble de l'oeuvre : la nostalgie de la mère-patrie, la quête passionnée de l'amour transgressif, la perte de l'identité, et le combat d'un individu créatif contre un régime qui veut l'asservir.
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Voici un roman de Vladimir Nabokov inédit en français. Mécontent de la traduction anglaise de Chambre obscure qui était la version initiale de Rire dans la nuit, Vladimir Nabokov, exilé aux Etats-Unis, décida en 1937 de se traduire lui-même. Ce défi linguistique donna une oeuvre nouvelle et transformée, à "la précision absolue", évidente comme un axiome au pessimisme froid : "Il était une fois à Berlin, en Allemagne, un homme qui s'appelait Albinus. Il était riche, respectable et heureux. Un jour il abandonna sa femme pour une jeune maîtresse ; il aimait ; n'était pas aimé ; et sa vie s'acheva en catastrophe." Sous l'apparence d'un mélodrame berlinois, d'une comédie de moeurs, à trois, où l'on trompe et où l'on est trompé, Nabokov fait jouer la mécanique implacable de sa démonstration. L'amour est-il aveugle ? Oui, répond le démiurge Nabokov. La variation sur l'adultère devient alors une cruelle parodie où Gogol et Tolstoï passent comme des ombres. Le roman s'élargit en une fable intemporelle, les couleurs de la vie se fanent et se fondent bientôt dans une nuit noire sans lune. Pourtant, dans l'obscurité quelqu'un rit.
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Lettres à Véra
Vladimir Nabokov
- Le Livre De Poche
- Le Livre De Poche Biblio
- 4 Septembre 2019
- 9782253906780
Vladimir Nabokov et sa femme Véra se sont rencontrés en 1923, à Berlin, où leurs familles avaient fui le pouvoir bolchevique. Tout au long du demi-siècle que dure leur mariage, ils ne sont séparés que rarement, mais alors il lui écrit abondamment. Dans cette correspondance à sens unique - Véra ayant détruit ses propres lettres -, on lit la passion de Nabokov pour sa femme, son quotidien dans le milieu de l'émigration russe à Berlin, les bouleversements auxquels tous deux sont confrontés dans leur vie matérielle et affective, le dénuement qui est le sien lors de ses débuts à Paris, l'intérêt croissant éveillé par son oeuvre auprès des éditeurs et d'un public éclairé, le soutien indéfectible que lui apporte Véra. Ces lettres, outre ce qu'elles révèlent sur l'homme, nous font découvrir le laboratoire de l'écrivain - son énergie créatrice, la pléthore de sujets qui surgissent et disparaissent, l'intensité de son travail - et l'on y reconnaît l'originalité de son style : sa veine parodique, poétique, sa vivacité et ses jeux de mots.Par-delà le seul intérêt biographique, une jubilation de l'écriture, une fantaisie enflammée et le fantôme désirable de la femme qui inspira ces mots. Éric Chevillard, Le Magazine littéraire.Une correspondance hautement délectable, tant s'y déploient le style proprement enchanteur de l'écrivain, la grâce surnaturelle des détails et des métaphores parfaites. Nathalie Crom, Télérama.Édition établie par Olga Voronina et Brian Boyd.Traduit du russe et de l'anglais par Laure Troubetzkoy.
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«La méprise, dans un esprit de parenté absolu avec le reste de mes livres, n'a aucun commentaire social à faire, ni aucun message à accrocher entre ses dents. Ce livre n'exalte pas l'organe spirituel de l'homme et n'indique pas à l'humanité quelle est la porte de sortie. Il contient bien moins d'idées que tous ces plantureux et vulgaires romans que l'on acclame si hystériquement dans la petite allée des rumeurs entre les balivernes et les huées. [...]Hermann et Humbert sont identiques comme deux dragons peints par le même artiste à différentes périodes de sa vie peuvent se ressembler. Tous deux sont des vauriens névrosés; cependant il existe une verte allée du Paradis où Humbert a le droit de se promener à la nuit tombée une fois dans l'année; mais l'Enfer ne mettra jamais Hermann en liberté surveillée.»Vladimir Nabokov.
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Le Don n'est pas seulement un roman - autobiographique ou non - mais aussi une étude littéraire, un livre à l'intérieur d'un livre, dans lequel sont analysés minutieusement tous les mécanismes de la création, et les bases sur lesquelles elle repose:la mémoire, dans les poèmes sur l'enfance; l'imagination, dans la tentative d'interprétation concernant l'univers paternel; la réalité historique.
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«Lorsque j'ai commencé à écrire Pnine, j'avais un projet artistique précis : créer un personnage comique, pas séduisant physiquement - grotesque, si vous voulez - et le faire ensuite apparaître, par rapport aux individus soi-disant "normaux", comme, et de loin, le plus humain, le plus important, et, sur un plan moral, le plus séduisant. Quoi qu'il en soit, Pnine n'a vraiment rien du bouffon. Ce que je vous offre, c'est un personnage tout à fait nouveau dans la littérature - un personnage important et intensément pathétique - et en littérature, il naît des personnages nouveaux tous les jours.» Vladimir Nabokov, 1955.
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Franz, jeune homme timide et sans caractère, monte à Berlin chez son oncle dans l'espoir d'obtenir un emploi. Dreyer est un homme d'affaires qui a réussi. Sa femme, Marthe, bourgeoise sans imagination, s'ennuie. Très vite elle devient la maîtresse de Franz. De l'aveu même de son auteur, l'intrigue du roman «n'a rien de bien nouveau» : une banale histoire d'adultère. Mais la façon de la traiter ne l'est pas. Le livre est écrit sous le signe du jeu. Ce qui retient l'attention au milieu de cette farce boulevardière, ce sont tous les petits détails étranges que Nabokov sème sur son chemin : un cinéma en construction ; des pantins mécaniques fascinants ; le propriétaire de l'appartement de Franz, vieillard torve qui s'invente une femme ; un homme monstrueux privé de nez... Le roman est ancré dans une sorte de brouillard onirique, à l'orée du fantastique, et ce grâce à des inventions narratives brillantes. Écrit en 1928, Roi, dame, valet est le deuxième roman de Nabokov. On y trouve déjà l'élégance de style et l'humour acerbe et misanthrope du romancier.
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Écrits en russe, puis en anglais avec l'aide de son fils Dmitri, les 64 chefs-d'oeuvre retenus par Nabokov pour l'édition de ses Nouvelles complètes. Les premières parurent dans les revues de l'émigration, d'autres furent réunies en recueil dès que Nabokov eut gagné un vaste public, d'autres enfin furent publiées dans de grands journaux américains. Autobiographiques - comme «Premier amour», la plage de Biarritz inchangée depuis l'impératrice Eugénie, des femmes en col de satin perle aux ombrelles volantées, un amoureux transi de sept ans et un début d'enlèvement -, imprégnées de la mélancolie de Russes déracinés et viveurs, ou récits de passion brûlante comme «Un Léonard», toutes ces nouvelles d'une grande intensité poétique révèlent la variété d'un talent qui donne ici, dans des récits concis, le concentré du génie que déploiera Nabokov dans ses romans.
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Deux mois après la mort du célèbre romancier Sebastian Knight, son jeune frère entreprend d'écrire sa biographie, de démêler le vrai du faux d'une destinée hors du commun. Qui était Sebastian Knight ? L'écrivain respecté, salué par ses pairs, ou l'homme secret profondément marqué par deux étranges histoires d'amour ? Sous la forme d'une enquête haletante, le premier roman que Nabokov signa en anglais constitue une réflexion amère sur l'impossibilité de parvenir à connaître la vraie vie d'un autre être, fût-ce du plus proche.
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Lorsque l'Armée rouge menace de s'emparer de la Crimée, Martin et sa mère fuient en Europe de l'Ouest.
C'est à Cambridge que le jeune héros va faire ses études. Il y côtoie des Anglais, tel son ami Darwin, mais aussi des Russes, plus ou moins anglophiles. Il y retrouve surtout Sonia, sa jeune et intelligente cousine. Est-ce pour l'impressionner qu'il décide de transcender sa nature et imagine un projet inutile et fou ?
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Littératures réunit l'ensemble des conférences données par Vladimir Nabokov entre 1941 et 1958 dans plusieurs universités américaines où il enseigne la littérature européenne. On y trouve, outre deux essais, « Bons lecteurs et bons écrivains » et « L'art de la littérature et du bon sens », des réflexions et analyses originales et percutantes consacrées aux oeuvres de Dickens, Flaubert, Stevenson, Proust, Kafka, Joyce, ainsi qu'à celles de ses compatriotes russes, Gogol, Tourgueniev, Dostoïevski, Tolstoï, Tchekhov et Gorki. Ce volume propose enfin une longue étude, tout aussi iconoclaste, du Don Quichotte de Cervantès.
Balayant la plupart des idées admises concernant ces chefs-d'oeuvre, Nabokov affirme avec superbe, humour et ironie sa propre conception de la littérature : rejet de l'approche historique, sociologique ou psychologique (Freud, le « charlatan viennois », est constamment la cible de ses sarcasmes), suprématie de la structure, du style, du détail et de l'agencement des détails entre eux. « Caressez les détails, les divins détails », tonitrue-t-il de sa chaire. Et encore : « La littérature est invention. La fiction est fiction. Appeler une histoire "histoire vraie", c'est faire injure à la fois à l'art et à la vérité. Tout grand écrivain est un grand illusionniste. » Nabokov, qui abandonna l'enseignement en 1958 après le succès de Lolita, avait l'intention de réunir ses cours sous une forme « publiable ». Si ce projet ne vit pas le jour de son vivant, ce fut chose faite grâce à l'éminent professeur américain Fredson Bowers, qui construisit le livre à partir des notes - le plus souvent manuscrites - et des croquis laissés par Nabokov, et de ses exemplaires annotés des ouvrages qu'il citait à ses élèves. Les cours sont devenus essais, mais sans rien perdre de leur caractère enveloppant ni de la merveilleuse chaleur qu'ils dégageaient sur le plan pédagogique. Dans son introduction, John Updike relève « l'accent, le plaisir communicatif de faire sonner les phrases, la présence de comédien de ce conférencier qui, alors corpulent et presque chauve, avait été autrefois un athlète, et qui s'inscrivait dans la tradition russe des flamboyants exposés oraux ».
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Adam Krug, professeur de philosophie de renommée internationale, perd sa femme et se retrouve seul tuteur de son fils. Leur amour est au centre de ce récit qui se déroule dans l'univers sombre de la dictature. Car Paduk, un ancien camarade de classe de Krug, a pris le contrôle de l'État. La raison et le sens commun désertent la nation.
Brisure à senestre, écrit en 1946, est une fiction inspirée des régimes totalitaires du XXe siècle que côtoya pour son malheur Vladimir Nabokov. Réalisme et onirisme noir s'orchestrent sans fausse note dans ce texte d'une richesse rare, illustrant plus que jamais la puissance de la littérature.
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Lorsque Machenka parut en anglais en 1970, les lecteurs y apprécièrent surtout les échos du premier amour de Nabokov, la «Tamara» de son autobiographie récemment révisée, Autres rivages. Mais pour le public, ce n'était pas tant un récit autobiographique qu'un portrait de l'exil. Nabokov est ici l'observateur scrupuleux de la vie d'émigré. Situé en avril 1924, quand les Russes fuyaient Berlin en masse, le récit montre Ganine en train de se préparer vaguement à partir de la France. Alfiorov, qui vient d'emménager dans la chambre voisine de celle de Ganine, se prépare à accueillir sa femme, bloquée depuis des années en Russie soviétique, qui doit le retrouver dans six jours, et compte bien l'installer dans la chambre de Ganine. Ganine découvre alors que la femme d'Alfiorov n'est autre que Machenka, son premier amour, avec qui il avait goûté en 1915 tous les délices d'une radieuse passion de jeunesse, jusqu'à ce qu'un an après ils se perdent de vue. En entendant de nouveau son nom, Ganine est brutalement sorti de son engourdissement et revit dans sa mémoire toute la félicité du passé, avec une violence qui efface le présent. Ganine décide de quitter Berlin avec Machenka et, la veille de son arrivée, enivre un Alfiorov surexcité jusqu'à ce qu'il s'effondre inconscient. Il se dirige alors vers la gare pour être le premier à retrouver Machenka et l'escamoter ensuite...