Banni de la communauté juive à 23 ans pour hérésie, Baruch Spinoza décide de consacrer sa vie à la philosophie. Son objectif ? Découvrir un bien véritable qui lui "procurerait pour l'éternité la jouissance d'une joie suprême et incessante". Au cours des vingt années qui lui restent à vivre, Spinoza édifie une oeuvre révolutionnaire. Comment cet homme a-t-il pu, en plein XVIIe siècle, être le précurseur des Lumières et de nos démocraties modernes ? Le pionnier d'une lecture historique et critique de la Bible ? Le fondateur de la psychologie des profondeurs ? L'initiateur de la philologie, de la sociologie, et de l'éthologie ? Et surtout, l'inventeur d'une philosophie fondée sur le désir et la joie, qui bouleverse notre conception de Dieu, de la morale et du bonheur ? A bien des égards, Spinoza est non seulement très en avance sur son temps, mais aussi sur le nôtre.
C'est ce que j'appelle le "miracle ", Spinoza. F.L.
Qu'entendons-nous par « bonheur » ? Dépend-il de nos gènes, de la chance, de notre sensibilité ? Est-ce un état durable ou une suite de plaisirs fugaces ? N'est-il que subjectif ? Faut-il le rechercher ? Peut-on le cultiver ? Souffrance et bonheur peuvent-ils coexister ? Pour tenter de répondre à ces questions, Frédéric Lenoir propose un voyage philosophique, joyeux et plein de saveurs. Une promenade stimulante en compagnie des grands sages d'Orient et d'Occident. Où l'on traversera le jardin des plaisirs avec Epicure. Où l'on entendra raisonner le rire de Montaigne et de Tchouang-tseu. Où l'on croisera le sourire paisible du Bouddha et d'Epictète. Où l'on goûtera à la joie de Spinoza et d'Etty Hillesum. Un cheminement vivant, ponctué d'exemples concrets et des dernières découvertes des neurosciences, pour nous aider à vivre mieux.
Les idées ne mènent pas le monde. Pourtant, les représentations que les hommes se font de leur humanité le font tourner dans un sens ou dans l'autre. À l'origine des grandes révolutions scientifiques, il y a une idée philosophique de l'homme : l'« animal rationnel » de l'Antiquité est lié à la naissance des sciences naturelles ; à l'âge classique, l'« âme étroitement unie à un corps » de la métaphysique cartésienne est indissociable de la physique mathématique ; le « sujet assujetti » du structuralisme était l'objet privilégié des sciences humaines triomphantes du siècle passé ; et le vivant défini par ses « capacités cognitives » marque la victoire actuelle des neurosciences.Chaque définition de l'homme charrie aussi son lot de croyances morales et d'idéologies politiques, d'autant plus puissantes qu'elles semblent soutenues par les certitudes scientifiques de leur époque. Derrière l'esclavagisme ou le racisme, à l'origine du totalitarisme ou des formes les plus subtiles de l'antihumanisme contemporain, se trouve une définition de notre humanité. C'est toujours au nom de ce qu'est l'homme ou de ce qu'il doit être que l'on prescrit ce qu'il faut faire et ne pas faire. L'idée d'humanité se situe à l'entrecroisement d'un rapport aux savoirs qu'elle permet de garantir et d'un rapport à des normes qu'elle permet de fonder. Elle est donc le lieu de toutes les confusions et l'enjeu de toutes les querelles de légitimité.Quelle idée de l'homme peut-elle encore être la nôtre aujourd'hui qu'on le décrète un « animal comme les autres » ? Que reste-t-il de notre humanité si elle ne peut plus se définir par sa place entre divinité et animalité ?L'« animal rationnel » n'a pas dit son dernier mot. Pas plus que l'humanisme, que l'on annonce pourtant « épuisé ».
Un texte précieux et puissant de Francis Wolff qui, contre le relativisme de notre temps, grâce à la limpidité des idées et la force des arguments, fonde un humanisme reposant sur l'universalité.
Jamais nous n'avons été aussi conscients de former une seule humanité. Nous nous savons tous exposés aux mêmes risques : changement climatique, crise économique et écologique, épidémies, terrorismes, etc. Mais alors qu'elle s'impose dans les consciences, l'unité de l'humanité recule dans les représentations : revendications identitaires, nationalismes, xénophobies, radicalités religieuses. L'universel est accusé de toutes parts : il serait oublieux des particularismes et des différences, en somme il serait trop universel. Ou il ne le serait pas assez, il ne serait que le masque du plus fort : du patriarcat (tous les hommes, mais pas les femmes), de l'Occident (tous les hommes, mais seulement les Blancs), ou de l'anthropocentrisme (tous les hommes, mais pas les animaux).
Contre ces replis, il faut que les idées universalistes retrouvent leur puissance mobilisatrice et critique. Contre la dictature des émotions et des opinions, défendre la raison scientifique. Contre l'empire des identités, refonder une éthique de l'égalité et de la réciprocité.
Sur quoi peut aujourd'hui reposer cet héritage des Lumières ? Ni sur un Dieu, ni sur la Nature, car ils prouvent tout et son contraire. Il faut s'y résoudre : l'humanité est seule source de valeurs. Pour autant, nous ne sommes pas condamnés au relativisme. Car l'humanité, ce n'est pas seulement l'ensemble des êtres humains, c'est aussi la qualité présente en chacun de nous et qui nous lie aux autres : non pas la capacité de communiquer qui est aussi propre à d'autres espèces, ni l'aptitude à raisonner que possèdent certaines machines, mais la faculté de raisonner en communiquant, autrement dit de dialoguer.
Pendant plusieurs années, Geoffroy de Lagasnerie s'est rendu à la cour d'assises de Paris. Il a vu être jugés et condamnés des individus accusés de braquage, d'attentat, d'assassinat, de coups mortels, de viol. À partir de cette expérience, il propose une réflexion sur l'État pénal, le pouvoir et la violence.
Nos manières de rendre la Justice s'inscrivent dans un système général et a priori paradoxal : pour juger, les procès construisent une narration individualisante des acteurs et des causes de leurs actes ; mais, pour réprimer, ils transforment chaque action interindividuelle en agression contre la « société » ou contre l'« État ».
Comment comprendre ce système du jugement et de la répression et ce jeu des catégories pénales ? La Loi est souvent présentée comme instaurant le règne de la raison contre les réactions passionnelles. Ne produit-elle pas en réalité des effets de dépossession et du traumatisme ? À quelles conditions une sociologie critique pourrait-elle nous donner les moyens d'imaginer un droit moins violent, un État moins souverain et une justice plus démocratique ?
En mêlant récits et analyses théoriques, Geoffroy de Lagasnerie montre que l'institution judiciaire ne forme pas seulement une réponse à la délinquance. La scène du tribunal, où un individu est forcé de comparaître devant des juges, est un miroir grossissant de notre appartenance à l'État. Si bien que, au bout du compte, cet ouvrage offre une exploration de notre condition de sujet politique.
« Le séminaire des années 2004 à 2007 s'articule à la fois à une conjoncture et à une oeuvre en cours : une contre-révolution libérale victorieuse depuis la deuxième moitié des années 1990 et une théorie de la singularité des mondes telle que déployée dans Logiques des mondes, qui paraît en 2006.
Pour autant que l'adversaire libéral de toute vérité l'emporte provisoirement, la pensée supporte une dure désorientation. Pour autant qu'il s'agit de penser ce qu'est un monde, et notamment le nôtre - celui de la désorientation -, la tâche est de repérer les appuis pour s'y orienter vers la naissance de vérités neuves. Le but est donc bien de «s'orienter dans la pensée, s'orienter dans l'existence». D'où que les matériaux examinés dans ce séminaire sont fortement marqués par leur contemporanéité. Ils doivent en effet témoigner de la singularité du monde contemporain. ».
A. B.
« Cela a duré six ans. Pourquoi ce travail presque maniaque à partir de Platon ? C´est que c´est de lui que nous avons prioritairement besoin aujourd´hui : il a donné l´envoi à la conviction que nous gouverner dans le monde suppose qu´un accès à l´absolu nous soit ouvert. Je me suis donc tourné vers La République, oeuvre centrale du Maître consacrée au problème de la justice, pour en faire briller la puissance contemporaine. Je suis parti du texte grec sur lequel je travaillais déjà avec ardeur il y a cinquante-quatre ans. J´ai commencé par tenter de le comprendre, totalement, dans sa langue. Je me suis acharné, je n´ai rien laissé passer ; c´était un face-à-face entre le texte et moi. Ensuite, j´ai écrit ce que délivrait en moi de pensées et de phrases la compréhension acquise du morceau de texte grec dont j´estimais être venu à bout. Peu à peu, des procédures plus générales sont apparues : complète liberté des références ; modernisation scientifique ; modernisation des images ; survol de l´Histoire ; tenue constante d´un vrai dialogue, fortement théâtralisé. Évidemment, ma propre pensée et plus généralement le contexte philosophique contemporain se sont infiltrés dans le traitement du texte de Platon, et sans doute d´autant plus quand je n´en étais pas conscient. Le résultat, bien qu´il ne soit jamais un oubli du texte original, pas même de ses détails, n´est cependant presque jamais une "traduction" au sens usuel. Platon est omniprésent, sans que peut-être une seule de ses phrases soit exactement restituée. J´espère être ainsi parvenu à combiner la proximité constante avec le texte original et un éloignement radical, mais auquel le texte, tel qu´il peut fonctionner aujourd´hui, confère généreuse- ment sa légitimité. C´est cela, après tout, l´éternité d´un texte. » Alain Badiou
Le philosophe invite la jeunesse à s'interroger sur le sens à donner à sa vie et l'exhorte à utiliser sa liberté en prenant des risques pour changer le monde.
La technique est appréhendée comme horizon de toute possibilité à venir et de toute possibilité d'avenir. L'auteur explique comment l'Occident a refoulé la technique comme objet de pensée, en oubliant une figure, celle d'Epiméthée, le frère jumeau de Prométhée. Il plaide pour une rencontre de la philosophie et de la technologie.
Que se passe-t-il lorsque, après la science-fiction, la philosophie se saisit de la question des robots ?
Ils sont pensés comme des « machines insurrectionnelles » : une intelligence artificielle (IA) avec un corps particulier, ni animal ni végétal, qui déstabilise l'Évolution et déconcerte les hommes qui doivent constamment négocier avec elles.
Dans la lignée de ses travaux pionniers sur le rapport homme-animal, Dominique Lestel prolonge dans cet essai sa réflexion sur ce que signifie « être vivant » en dehors de la notion d'espèce. Il plaide ainsi pour que la robotique autonome ne soit plus pensée dans un cadre purement instrumental mais entre dans un espace existentiel, telle que nous la vivons chaque jour, nous engageant dès lors sur la voie d'une révolution ontologique.
Cet essai novateur dans son propos ne l'est pas moins dans sa conception.
Killoffer, dessinateur et scénariste, a relevé le défi d'illustrer le livre, ou plutôt, à l'instar de ce que l'Intelligence artificielle fait aux hommes, de questionner le texte en imaginant quelle bande dessinée il pourrait être.
Barbara Cassin et Alain Badiou s'interrogent, en échangeant et en argumentant, sur leur démarche intellectuelle : elle, femme et sophiste, lui, homme et platonicien.
Alain Badiou est platonicien (plutôt platonicien), Barbara Cassin est sophiste (plutôt sophiste).
Cela a-t-il quelque chose à voir avec le fait qu'il soit un homme et qu'elle soit une femme ?
Telle est la question que nous nous posons depuis longtemps.
Depuis que nous nous connaissons en somme, et que nous avons commencé à travailler ensemble comme directeurs de collection.
À un moment donné, nous avons pris cette question à bras-le-corps.
C'est venu, peut-être, d'une remarque à notre propos disant que, un platonicien avec un(e) sophiste, cet attelage qui ne laissait rien échapper devenait pour de bon dangereux. Nous avons ri, et réfléchi.
D'abord, nous avons échangé des lettres, jouant avec le plaisir d'une correspondance sporadique, parfois rauque, pendant trois ans. Au beau milieu de quoi nous avons décidé de faire un séminaire commun ailleurs, loin de nos bases : à Johns Hopkins. On nous a obligés à répondre sans arrière-monde, Alain Badiou en mathématicien-platonicien, Barbara Cassin en philologue-sophiste.
À bras-le-corps donc, mais encore latéralement comme on voit. Nous avons alors ressenti la nécessité d'exhiber les éléments clefs à quoi tiennent nos positions, ce qui philosophiquement nous tient. Puis nous avons déroulé les conséquences strictes de ces solidités quant à l'idée que nous nous faisons du rapport homme femme.
Au moment de conclure, nous nous sommes demandé ensemble pourquoi nous choisissions la Grèce.
Avant le développement de la démocratie, les hommes vivaient sous une loi: celle des ancêtres, ou celle de dieu. ils se reconnaissaient en principe soumis à quelque chose qui leur était extérieur et supérieur. aujourd'hui, la société veut s'organiser selon les droits de l'homme: l'homme n'y veut rencontrer que lui-même.
Or nous nous qualifions de modernes, nous nous pensons comme modernes, c'est-à-dire comme différents de l'homme simplement homme. ainsi l'homme moderne veut n'être qu'un homme, et être autre chose qu'un homme. ce livre explore cette dualité, ou cette duplicité.
L'idée que soutient pierre manent est que la conscience, et le désir, d'être moderne tiennent à une contradiction antérieure irrésolue, que la " modernité " recouvre et dont elle vit: celle entre la cité et l'eglise, entre le paganisme et le christianisme, entre la nature et la grâce. l'homme moderne est celui qui rejette les vertus païennes au nom des vertus chrétiennes, et qui rejette les vertus chrétiennes au nom des païennes. il est celui qui, réfutant athènes par jérusalem et jérusalem par athènes, ne cesse de désirer, et d'apercevoir à sa portée, une troisième cité, qui pourtant ne cesse de lui échapper: la cité de l'homme.
L'illusion spécifique de l'homme moderne, c'est-à-dire l'illusion de l'avenir, est de prendre cette double négation pour une affirmation. l'ambition de ce livre est de dissiper cette illusion.
Pierre manent, directeur d'études à l'ecole des hautes études en sciences sociales, est l'auteur notamment de naissances de la politique moderne: machiavel, hobbes, rousseau (1977), histoire intellectuelle du libéralisme: dix leçons (1987), tocqueville et la nature de la démocratie (1982, rééd. 1993).
il y a vingt ans, mon premier manifeste pour la philosophie s'élevait contre l'annonce, partout répandue, de la « fin » de la philosophie. a cette problématique de la fin, je proposais de substituer le mot d'ordre : « un pas de plus ».
la situation a bien changé. si la philosophie était à l'époque menacée dans son existence, on pourrait soutenir aujourd'hui qu'elle est tout aussi menacée, mais pour une raison inverse : elle est dotée d'une existence artificielle excessive. singulièrement en france, la « philosophie » est partout. elle sert de raison sociale à différents paladins médiatiques. elle anime des cafés et des officines de remise en forme. elle a ses magazines et ses gourous. elle est universellement convoquée, des banques aux grandes commissions d'etat, pour dire l'éthique, le droit et le devoir.
tout le point est que par « philosophie » on entend désormais ce qui en est le plus antique ennemi : la morale conservatrice.
mon second manifeste tente donc de démoraliser la philosophie, d'inverser le verdict qui la livre à la vacuité de « philosophies » aussi omniprésentes que serves. il renoue avec ce qui, de quelques vérités éternelles, peut illuminer l'action. illumination qui porte la philosophie bien au-delà de la figure de l'homme et de ses « droits », bien au-delà de tout moralisme, là où, dans l'éclaircie de l'idée, la vie devient tout autre chose que la survie.
a. b.
Le principe de ce Grand Livre des philosophes est simple : rendre accessibles à tous ceux qui s´intéressent à la philosophie les oeuvres des plus grands philosophes de tous les temps. Chaque philosophe y est ainsi considéré via une oeuvre majeure de son répertoire, cet ouvrage partant du principe qu´il vaut mieux approfondir un texte plutôt que papillonner autour de plusieurs. Platon, qui inaugure ce volume, est donc décrypté via La République, Marc Aurèle par Les Pensées, Machiavel par Le Prince, Spinoza par L´Ethique, Karl Marx par Le Capital, Nietzsche par Ainsi parlait Zarathoustra, Sartre par L´Etre et le Néant, etc. Ainsi, à travers 31 philosophes, le lecteur non philosophe, peu ou pas assez philosophe voire simplement désireux d´appréhender autrement la philosophie aura-t-il la possibilité de nouer une première relation avec la philosophie dans un langage clair et une atmosphère détendue. Ce livre est une traduction de l´allemand, il est devenu en Allemagne un best-seller !
J'ai choisi de rendre hommage à six philosophes français - Canguilhem, Sartre, Foucault, Althusser, Deleuze et Derrida - dont l'oeuvre est connue et commentée dans le monde entier, et qui ont eu pour point commun, à travers leurs divergences, leurs disputes et leurs élans complices, de s'être confrontés, de façon critique, non seulement à la question de l'engagement politique mais à la conception freudienne de l'inconscient. Ils furent tous des stylistes de la langue, passionnés d'art et de littérature.
C'est bien parce qu'une telle confrontation est inscrite dans leurs oeuvres et dans leur vie qu'ils peuvent être réunis ici. Ils ont tous refusé, au prix de ce que j'appellerai une traversée de la tourmente, d'être les serviteurs d'une normalisation de l'homme, laquelle, dans sa version la plus expérimentale, n'est qu'une idéologie de la soumission au service de la barbarie.
Loin de commémorer leur gloire ancienne ou de m'attacher avec nostalgie à une simple relecture de leurs oeuvres, j'ai tenté de montrer, en faisant travailler la pensée des uns à travers celle des autres, et en privilégiant quelques moments fulgurants de l'histoire de la vie intellectuelle française de la deuxième moitié du xx siècle, que seule l'acceptation critique d'un héritage permet de penser par soi-même et d'inventer une pensée à venir, une pensée pour des temps meilleurs, une pensée de l'insoumission, nécessairement infidèle.
Il y avait un homme qui, à douze ans, avec des barres et des ronds, avait créé les mathématiques ; qui, à seize, avait fait le plus savant traité des coniques qu'on eût vu depuis l'Antiquité ; qui, à dix-neuf, réduisit en machine une science qui existe tout entière dans l'entendement ; qui, à vingt-trois, démontra les phénomènes de la pesanteur de l'air, et détruisit une des grandes erreurs de l'ancienne physique ; qui, à cet âge où les autres hommes commencent à peine de naître, ayant achevé de parcourir le cercle des sciences humaines, s'aperçut de leur néant et tourna ses pensées vers la religion ; qui, depuis ce moment jusqu'à sa mort, arrivée dans sa trente-neuvième année, toujours infirme et souffrant, fixa la langue que parlèrent Bossuet et Racine, donna le modèle de la plus parfaite plaisanterie, comme du raisonnement le plus fort ; enfin qui, dans les courts intervalles de ses maux, résolut, par abstraction, un des plus hauts problèmes de géométrie, et jeta sur le papier des pensées qui tiennent autant du Dieu que de l'homme. Cet effrayant génie se nommait Blaise Pascal.
Comment mourir ? Comment répondre à nos peurs ? Derrière les murs des monastères, les hommes de Dieu passent leur existence à préparer le grand passage. Peuvent-ils nous aider à comprendre la souffrance, la maladie, la peine et la solitude des derniers instants ? De Cîteaux à Lagrasse, de la Grande-Chartreuse à Solesmes, Nicolas Diat a recueilli les confidences de moines sur la fin de leurs vies. Au fil d'entretiens exceptionnels menés dans huit monastères, au plus près des "fils du silence", nous comprenons que leurs morts ne se ressemblent pas : il y en a de simples, d'heureuses, de belles et de lumineuses, des agonies lentes ou douloureuses.
L'auteur raconte le calvaire d'un jeune religieux atteint d'un mal fulgurant, ou d'un chanoine dévasté par sa bataille contre la leucémie, fait le portrait d'un frère dépressif qui a mis fin à ses jours, décrit les morts douces et angéliques des ermites. Si chaque expérience est singulière, les douleurs des moines, en revanche, nous sont familières : ce sont celles de tous les hommes. Porté par une écriture délicate, l'ouvrage de Nicolas Diat aborde avec grâce et sensibilité la question de la mort, en ouvrant les portes des abbayes.
Militant, journaliste, théoricien et écrivain, Guy Hocquenghem (1946-1988) a été une figure majeure de la gauche radicale française. Homosexuel, il s'est pensé comme un minoritaire et n'a eu de cesse de faire vivre pensée critique et contestation des pouvoirs établis.
Ce livre retrace les différentes étapes de sa trajectoire. Mais surtout, à partir de là, et à l'aide d'un très impressionnant travail d'archives et d'entretiens, il reconstitue tout un pan de l'histoire des années 1960 aux années 1980 en France : les mouvements sexuels et minoritaires, la gauche et l'extrême gauche, la presse, le champ littéraire, l'université, le surgissement du sida. Antoine Idier dépeint les mouvements politiques, intellectuels et culturels de l'après-1968, le « gauchisme » et le Front homosexuel d'action révolutionnaire, l'université de Vincennes et le journal Libération, la révolution conservatrice des années 1980.
L'ouvrage aborde des problèmes qui se trouvent toujours au centre du débat : les dynamiques des mouvements sociaux, les catégories de la politique et de la sexualité, les usages de la psychanalyse et du marxisme, l'écriture contestataire - mais aussi l'histoire et la biographie. En somme, il propose une réponse à ce qui reste une énigme : que s'est-il passé en mai 1968 et dans l'après-mai ? Quel héritage en tirer aujourd'hui pour réinventer nos formes de la pensée et de la politique ?
Le Séminaire proposant, grâce au guide qu'est Platon, une morale provisoire pour temps désorienté.
« Ce séminaire est vraiment exceptionnel, aussi bien quantitativement que par sa structure et sa visée. On pourrait le considérer comme un commentaire de ma traduction de La République de Platon proposé en public. J'y tente aussi de donner à mon idée du communisme nouveau, tout comme à la conception que je me fais de la philosophie elle-même, des appuis extrêmement détaillés et, je le crois, souvent originaux. En ce sens, il est une sorte d'introduction simultanée à Platon et à mon oeuvre propre.
Tout cela lui donne une étrange allure à la fois joyeuse et cependant chargée d'un contenu essentiel, presque unique dans mes écrits. Comme si ce dialogue, qui fait une voix de deux ou trois voix, parvenait à orchestrer mes thèmes essentiels au lieu de les laisser à leur austère nudité. » A. B.
Depuis 1966, une part importante de l'enseignement du philosophe Alain Badiou a pris la forme d'un séminaire, lieu de libre parole et laboratoire de pensée. Les éditions Fayard publient l'ensemble de ces Séminaires de 1983 à aujourd'hui, période où la documentation est abondante et continue. Ce volume est le quatorzième de la série.
Si la théorie de l'I.S. désormais peut encore être souvent incomprise ou abusivement traduite, comme il est arrivé parfois à celles de Marx ou de Hegel, elle saura bien revenir dans toute son authenticité chaque fois que ce sera historiquement son heure, à commencer par aujourd'hui même. Nous sommes sortis de l'époque où nous pouvions être falsifiés ou effacés sans appel.
En écrivant ses Pensées, Marc Aurèle bâtit en lui-même une citadelle inaccessible aux troubles des passions. Mais cette citadelle, où règne la sérénité, n'est pas une tour d'ivoire dans laquelle il se réfugierait en un égoïsme transcendant; elle est bien plutôt à la fois le haut lieu, d'où l'on accède à un immense champ de vision, et la base d'opérations qui permet d'agir au loin. Autrement dit, les Pensées sont le livre d'un homme d'action, qui cherche la sérénité, parce qu'elle est la condition indispensable de l'efficacité, et pour qui l'action humaine n'a de valeur profonde et durable que si elle s'insère dans la perspective du Tout de l'Univers et de la communauté de tous les hommes. Mais une telle attitude n'est autre que le stoïcisme lui-même, précisément sous la forme sous laquelle Epictète l'avait révélé à Marc Aurèle. Lorsque l'empereur s'efforce dans son livre de pratiquer trois disciplines fondamentales: voir la réalité telle qu'elle est, en se libérant de tout préjugé passionnel, accepter avec amour les événements tels qu'ils résultent du cours général de la Nature, agir au service de la communauté humaine, il ne fait rien d'autre que de s'exercer dans les trois parties de la philosophie telles qu'Epictète les avait définies. Les Pensées s'organisent autour de ce schéma ternaire. C'est pourquoi la présente introduction aux Pensées de Marc Aurèle pourra être lue en un certain sens comme une introduction au stoïcisme antique. N'y aurait-il pas finalement un stoïcisme éternel qui, à travers le temps et l'espace, serait l'une des attitudes possibles de la conscience humaineoe Pierre Hadot est depuis 1991 professeur honoraire au Collège de France. Ses recherches se sont concentrées tout d'abord sur les rapports entre hellénisme et christianisme, puis sur la mystique néoplatonicienne et la philosophie d'époque hellénistique. Elles se sont maintenant orientées vers une description générale du phénomène spirituel que représente la philosophie.
Peut-on changer de vie sans y laisser sa peau ? Tel est le dilemme de Fight Club.
Comment gagner en puissance et en joie sans détruire les autres ou le monde ? s'interrogeait Spinoza. Telle est la quête des X-men.
Et si un malin génie nous trompait, si rien n'était réel, demandait Descartes. C'est l'hypothèse de Matrix.
Faut-il craindre la passion ou y plonger corps et âme ? American Beauty nous éclaire sur le coup de foudre.
Clair et pédagogique, Cinéphilo se promène entre images et concepts pour nous rendre sensible la philosophie. C'est toute l'histoire de la philosophie qui prend vie, accessible et passionnante, sous les traits de Brad Pitt, Tom Cruise, Emmanuelle Béart ou Keanu Reeves.
Al-Fãrãbi est l'une des figures les plus importantesde la philosophie médiévale : son influence sur Avicenne, Averroès et Maïmonide fut considérable, aussi bien par ses commentaires des oeuvres d'Aristote que par ses oeuvres d'éthique et de philosophie politique.
Les Aphorismes choisis ont connu une postérité remarquable dans la philosophie médiévale arabe et juive. Fãrãbi y présente une excellente synthèse de sa pensée politique :
En exposant les « nombreux principes tirés des propos des Anciens sur la manière dont les cités devraient être gouvernées et rendues prospères, les modes de vie de leurs habitants rendus meilleurs, et ceux-ci conduits vers le bonheur ». Il élabore une réflexion originale sur l'âme humaine, la nature de la cité, les qualités exigées de l'homme politique et la recherche du bonheur.
«Al-Ma?mun (IXe siècle) écrivit à l?empereur des Rums (Byzantins) pour lui demander de lui faire parvenir des livres?[des livres furent rapportés] à Al-Ma?mun, celui-ci ordonna de les traduire et ainsi fut fait.»Ibn Al-Nadim, Kitab al-Fihrist (Xe siècle)«Le monde arabe a autrefois porté l?idée du travail sur soi-même, qui seul permet de s?autotransformer et de s?auto-instituer en tant que personne. Ce sont cette idée et ce travail occultés que nous voulons faire connaître par la collection «MAKTABA» qui signifie «bibliothèque».»Saber Mansouri/Michel Host«Amener le lecteur à l?auteur, amener l?auteur au lecteur, au risque de servir et de trahir deux maîtres, c?est pratiquer ce que j?aime appeler l?hospitalité langagière.»Paul Ricoeur